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Communiqué de presse

Des nanogouttes pour la synthèse et le criblage de molécules bioactives


​La recherche et le développement de nouveaux médicaments sont des processus longs et coûteux. Des chercheurs de notre laboratoire​​​ ont développé une technologie permettant de raccourcir considérablement le temps de synthèse et d’identification de molécules bioactives ainsi que de diviser par 1 000 la quantité de réactifs nécessaire.

Publié le 7 juillet 2009
Avec cette technique, ils ont reconstitué toutes les conditions permettant d’effectuer, dans une même nanogoutte, toutes  les étapes de synthèse et de criblage de nouvelles molécules. Ces résultats ouvrent de nouvelles voies pour la découverte de médicaments. Ces travaux viennent d’être publiés en ligne par la revue Angewandte Chemie.
Au cours de la dernière décennie, grâce à l’automatisation et à la miniaturisation de la production de molécules bioactives, les recherches à grande échelle de ce type de composés ont suivi une croissance exponentielle. L’industrie pharmaceutique pratique le criblage à haut débit sur des microplaques de 96, 384 ou 1536 puits permettant de réduire à quelques microlitres le volume requis pour une mesure. Cependant, avec des milliers de mesures effectuées chaque jour ces volumes demeurent encore trop importants. Ainsi, chaque criblage consomme plusieurs litres de solvants et génère une grande quantité de déchets plastiques (microplaques).

Quelles sont les solutions possibles ? Depuis quelques années, les chercheurs de notre laboratoire étudient la possibilité d’utiliser des gouttelettes de quelques dizaines de nanolitres comme des réacteurs minuscules. Les nanogouttes sont disposées en rangées sur une lame de microscope à l’aide d’un robot de pipetage. Ce même robot est utilisé pour ajouter des réactifs et faire un mélange réactionnel dans chaque gouttelette.  Afin que ces dernières ne bougent pas, chaque lame est recouverte d’un motif périodique constitué de zones hydrophiles (qui acceptent l’eau) entourées par des zones hydrophobes (qui repoussent l’eau). Ainsi, une fois déposées, les nanogouttes restent collées sur les zones hydrophiles et peuvent être utilisées de la même façon que les puits d’une microplaque. Plus de mille gouttelettes peuvent être disposées sur une seule lame de verre ! De plus, celle-ci est réutilisable plusieurs fois grâce à la robustesse de sa surface.

Avec ces travaux, les chercheurs démontrent également la possibilité d’enchaîner, sur une même lame, la synthèse chimique combinatoire[1]de molécules bioactives et leur criblage. Pour ce faire, ils se sont intéressés à l’exemple d’inhibiteurs d’une enzyme du virus de l’hépatite C (VHC) [2], la protéase NS3, qui assure la formation des protéines virales fonctionnelles et représente ainsi une cible pharmacologique stratégique.
Pour synthétiser les inhibiteurs de la protéase NS3 dans les gouttelettes, les chercheurs ont utilisé une approche d’assemblage chimique modulaire. Ainsi, de la même façon que l’on peut produire différentes constructions en utilisant des briques LEGOTM, toute une banque de molécules inhibitrices est assemblée dans les nanogouttes à partir de blocs chimiques pré-synthétisés. L’avantage de cette approche est la grande diversité de molécules actives qui peut être créée directement sur la lame en n’utilisant qu’un nombre limité de briques combinatoires. Ici, les chercheurs ont utilisé une collection de 200 blocs chimiques pour synthétiser plus de 20 000 composés différents. La capacité de ces molécules à inhiber la protéase NS3 a ensuite été directement testée sur les mêmes lames. Au bout de plusieurs cycles de criblage les chercheurs ont pu identifier quelques inhibiteurs prometteurs de cet enzyme qui pourront servir de point de départ au développement de nouveaux agents antiviraux.



1 La synthèse combinatoire est une méthode de synthèse simultanée d’une banque de composés nouveaux par la combinaison d’ensembles de composés de départ appelés « synthons ». Suivie par un criblage biologique à haut débit, la synthèse combinatoire est largement utilisée pour la recherche de nouveaux médicaments.
2 Avec plus que 180 millions de personnes infectées dans le monde le VHC pose un problème majeur de santé publique. Un médicament ciblé sur les étapes précoces du développement viral préviendrait l’installation de graves complications (cirrhose, hépatocarcinome).

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