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Fait marquant

Une puce silicium détectrice de toxines


​​​​​​​​​​​​​Sur la base d’une interaction spécifique connue entre toxines et canaux ioniques, nous avons développé une puce silicium qui décèle la présence de toxines via la modulation d’un courant électrique cellulaire. Cette puce devrait permettre d’automatiser la procédure de tests et, à terme, traduire directement la signature électrique en un signal d’alerte d’intoxication. Ce principe peut être adapté au contrôle des eaux de baignade à l’agro-alimentaire etc.

Publié le 9 novembre 2010
Des cas d’intoxications alimentaires dues à des phycotoxines (ou toxines marines) ont révélé un problème grave de santé public et la nécessité de mettre en place des outils d’alertes toujours plus sensibles et fiables. Sur la base d’une interaction spécifique connue entre toxines et canaux ioniques, des chercheurs du laboratoire Biopuces ont développé une puce patch-clamp qui décèle la présence de toxines via la modulation d’un courant électrique cellulaire. Cette puce silicium, afin d’être intégrée au sein d’un capteur au format mallette (Toxint’patch), a nécessité une étape d’analyse de l’interface cellule-puce pour définir les conditions qui améliorent le processus de scellement.

Les phycotoxines rendent poissons et coquillages impropres à la consommation humaine en raison d’une toxicité plus ou moins importante. Les actions de surveillance des produits de la mer et des risques associés aux micro-algues nécessitent le développement d’outils d’alerte toujours plus sensibles, spécifiques et transportables sur site (laboratoire d’analyse côtier). Le projet Multipatch, (Figure 1), développé conjointement entre notre laboratoire et le laboratoire Composants Intégrés pour le Vivant du Leti/DTBS, a permis de mettre au point une puce silicium micro-structurée, dédiée à l’analyse de courants ioniques cellulaires. En combinant la spécificité bien connue des toxines pour certains canaux ioniques cibles avec la sensibilité d’une électronique intégrée et la compacité d’un format mallette, les chercheurs tendent à faire de la puce silicium un biocapteur de toxines ou outil de contrôle qualité des produits d’origine marine. La performance de ce biocapteur dépend directement des qualités et propriétés de la puce silicium, élément clef au cœur du système. Au cours d’un travail de thèse [1], le coating SiO2 de la puce par un dépôt plasma PECVD avait déjà été montré comme améliorant la qualité du scellement cellule/puce mais aucune étude systématique n’avait encore été menée.


Figure 1 : Principe du « Multipatch » ou patch-clamp sur puce : la pipette de verre conventionnelle est remplacée par une puce en silicium microstructurée. Sur chacun des 9 sites (diamètre du microtrou 1,2 µm) une cellule unique est capturée et scellée par aspiration. Le courant ionique issu des canaux membranaires est enregistré et modulé en présence de toxines.

Nous venons de publier cette étude multiparamétrique [2], basée sur des caractérisations de surface, en collaboration avec le LMGP/INPG-Minatec, qui a permis de discriminer deux paramètres primordiaux conditionnant la bonne qualité du scellement et donc de la mesure électrique : le diamètre du micro-trou sur lequel la cellule est « scellée » ainsi que l’énergie de surface (en particulier les interactions dispersives). La validation électrophysiologique de ce lot de puces silicium a été menée en collaboration avec l'Institut des Neurosciences de Grenoble, sur 3 familles de canaux voltage dépendants ; l'inhibition du courant (Figure 2) ayant été démontrée avec des inhibiteurs de référence spécifiques ou non. La cible canal sodique Nav1.5 est particulièrement utilisée pour la détection de PSP, phycotoxines paralysantes de type saxitoxines.


Figure 2 : Enregistrement de courants sodiques (contrôle) sur puces silicium, dont les propriétés ont été optimisées grâce à une caractérisation biophysique, physico-chimique systématique (rugosité, hydrophilie, charges de surface, épaisseur du diélectrique, diamètre du microtrou, capacitance) et inhibition de ce courant en présence de phycotoxine PSP (+ gonyautoxine). À droite, la courbe courant/tension traduit la signature électrique de ces courants sodiques, avec et sans toxine.

Cette puce silicium est désormais intégrée au cœur d’une mallette, assemblée aux modules d’électronique par un système pneumatique qui réduit le temps de mise en œuvre de 20 à 5 minutes et connectée à des modules fluidiques, eux-mêmes pilotés par un logiciel dédié (financement GRAVIT 2010-2011). Ce capteur au format mallette devrait permettre d’automatiser la procédure de tests, de paralléliser ces tests sur 9 sites de mesures et, à terme, de traduire directement la signature électrique en un signal d’alerte d’intoxication.

Ce principe de détection du Toxint’patch peut être adapté à d’autres secteurs, comme le contrôle des eaux de baignade ou l’agro-alimentaire.
PSP : paralytic shellfish poisoning (toxines paralysantes)
PECVD : plasma enhanced chemical vapor deposition
Toxint’patch : Toxin detection with integrated patch-clamp

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